jeudi 30 novembre 2017

En regardant courir les fleuves


Direction le Paraguay. Direction l'hémisphère sud. Trois vols au programme du jour avec la compagnie Avianca. Bon élève, j'arrive à l'aéroport de Cancun pour 9h, soit plus de trois heures avant mon premier vol. Problème, le vol n'est pas affiché sur les moniteurs. Pas de trace de guichet Avianca. Pas de stand d'enregistrement ouvert. Rien. Le vol fantôme. Pas plus d'explications au guichet d'information de l'aéroport. Étrange. Je vois passer un employé aux couleurs de la compagnie. Je l'interroge. Il embauche à 10h. Exactement l'heure à laquelle mon vol apparaît sur les écrans et l'heure à laquelle les guichets d'enregistrement ouvrent. 10h, le début de ma journée marathon. Premier court vol vers le Salvador. On recule les aiguilles numériques d'une heure. Ensuite quatre heures de trajet vers Lima, on avance de deux heures. Il est donc environ 20h au Pérou quand l'avion se pose. C'est la deuxième fois que j’atterris à Lima. La première fois c'était pour mon voyage en solo d'un mois entre le Machu Pichu, le lac Titicaca et le salar d'Uyuni. C'est donc ici, il y a trois ans, qu'a commencé à germer cette idée de voyage d'un an à travers le globe. Je me rappelle encore de mon état d'esprit de l'époque en débarquant à Lima. Je ne suis clairement plus la même personne aujourd'hui. On grandit vite en voyage. 23h, dernier vol. Trois heures de trajet, avec à nouveau deux heures de bonus. Un nouveau tampon sur le passeport, je récupère mon sac, je sort de l'aéroport d'Asuncion. Il est 5h, il fait encore nuit. J'évite la file des taxis et après une petite trotte je repère un arrêt de bus. Rapidement, un véhicule bondé s'arrête, je monte, et d'un coup je raccroche à un autre monde. Le bus redémarre. Je tends au chauffeur un billet de 100.000 guaranis fraîchement retiré. Je profite du temps qu'il me rende la monnaie sur une course qui en coûte moins de 300 pour observer ces paraguayens « qui se lèvent tôt ». Une demi heure plus tard, je m'expulse littéralement du bus et marche encore deux bons kilomètres pour me présenter vers 6h devant la posada où j'ai réservé une chambre pour le soir. Par chance, celle-ci est prête. J'y finis ma nuit.

Sans surprise, Asuncion n'est pas un haut lieu touristique. C'est une grande ville d’Amérique du Sud sans grand charme mais avec tout de même deux ou trois jolis bâtiments et une paire de parcs. L'anglais ne m'est guère plus d'un grand secours. C'est quand cela arrive que l'on s'aperçoit qu'on a quitté les routes standards. En fin de journée, je regagne ma chambre. Je suis accueilli par des animaux nettement moins sympathiques que les coatis guatémaltèques ou les biches de l'ouest américain. Des cafards. Quatre ou cinq, de la taille du pouce, se baladant sur les murs, sur le lit, dans mon sac. Le tenancier se confond en excuses, m'explique que la maison voisine est à l'abandon, que ça n'arrive jamais... Il me propose la « suite »  de l'hôtel en échange. Problème, même accueil. En ouvrant la porte, je tombe nez à nez avec un cafard. Le gérant est blême, moi aussi. Je saute sur mon téléphone en quête d'un nouveau nid. Mon hôte file à l'autre bout de l'hôtel en pestant en espagnol. Il revient et me propose une nouvelle chambre, à l'extrême opposé du problème. Elle à l'air clean. Il est 21h passée. La flemme de retraverser toute la ville, je me résigne. Le lendemain, toujours confus, le gérant me propose de me conduire au terminal de bus. Une heure de transport en commun d'épargnée. C'est toujours ça. Changeons d'air.




Je traverse le pays d'ouest en est pour me rendre à Ciudad del Este, à la frontière du Paraguay avec le Brésil et l'Argentine. Ce sont les fleuves Parana et Iguazu qui servent de limites naturelles entre les trois pays. Et c'est donc ici, entre le Brésil et l'Argentine que le deuxième fleuve cité offre les célèbres chutes éponymes, les chutes d'Iguazu. Je m'accorderais deux jours de visite pour observer des deux côtés ce nouveau chef d’œuvre de la nature. Je réside côté argentin. Niveau logistique, ça a donc été le festival du tampon (entrée et sortie) pendant trois jours (Paraguay > Brésil > Argentine > Brésil > Argentine). Le site est très touristique mais assez bien présenté des deux côtés. Globalement le Brésil offre le meilleur point de vue mais l'Argentine propose une approche plus sauvage et plus prés de l'action. Assez sauvage pour croiser la route d'un serpent par exemple. Le jour de ma visite le niveau des eaux étant trop haut, l’accès à l'île Saint Martin (au cœur du site) n'était malheureusement pas possible. On ne peut rester que fasciné devant l'immensité de ces chutes qui doivent s'étirer sur deux bons kilomètres de long. Au plus prés, on a littéralement le souffle coupé face à la force du débit. On reste ainsi hébété, saisi par la cinglante bruine émise par ces chutes torrentielles, à regarder les oiseaux planer au dessus de ce vacarme sonore. Le fleuve chargé de boue trace sa route et explose de toute part sur ce panorama verdoyant mais abrupt. Plus loin, au dessus de la Gorge du Diable, là où les eaux se précipitent dans une étroite crique, le débit est tellement impressionnant que les eaux restent très hautes en suspension. On ne voit plus le fleuve en dessous, comme si nous étions suspendus au dessus d'une nuage d'eau.




 






J'ai eu la chance de faire mes deux jours de visite sous un magnifique soleil estival. Le dernier jour, c'est par contre sous la pluie que je monte dans le bus de nuit qui va longer un autre fleuve, le fleuve Uruguay et me conduire proche du pays du même nom. Nous sommes dans un endroit assez sauvage et très végétal. La pluie s’abat sur la terre, se colore et glisse sur l'asphalte et sous les roues du bus. Au petit matin je descends à Concordia, à la frontière uruguayenne. Enfin, contre le fleuve Uruguay, le poste frontière est 20 kilomètres plus au nord. On est dimanche, pas de colectivos, pas de bus, juste des taxis qui me proposent une somme largement au dessus de ce qu'il reste dans mon portefeuille en pesos argentin. Je checke la carte et identifie un autre « passage » une centaine de kilomètres plus au sud, à Colon. Je tope un bus et deux heures plus tard vers 12h je débarque dans un endroit similaire, pas de colectivos, pas de bus urbains mais je suis plus proche de la frontière. Je file mes derniers pesos à un taxi qui me dépose 5 kilomètres plus loin, au pied du pont. Sous une grosse chaleur je m'impose une grosse demi heure de marche pour traverser le fleuve Uruguay et accéder au territoire du même nom. Assez rigolo de passer le poste frontière à pieds. Ce qui l'est moins ce sont les 5 kilomètres restants pour regagner Paysandu, le premier village. Le stop ne marche pas trop, voire pas du tout. C'est donc résigné que je reprends ma marche caniculaire. Heureusement, un kilomètre plus loin, un scooter s'arrête et mettra fin à mon calvaire. Paysandu est assez sympa. La ville est posée sur les bords du fleuve et offre une plage assez originale. Une bande de sable d'une dizaine de mètres et juste après un parc arboré où s'entasse toute une joyeuse population dominicale. L'ambiance est décontractée et plaisante. Je longe tout cela, le regard envieux, chargé comme une mule. Note pour plus tard : ne plus prévoir de gros trajet un dimanche.


Mon séjour uruguayen se partagera avec deux autres endroits : Montevideo et Colonia del Sacramento. Première surprise à Montevideo, apparemment ma tenue bermuda et t-shirt n'est pas appropriée. La mode est plutôt au jean et gilet. En effet, ici la température est de 15° avec un petit vent. Le temps de rejoindre mon hôtel et je vais m'adapter à ce style vestimentaire. La chaleur c'est sympa et ne pas connaître l'hiver de l'année c'est une idée cool mais mon corps a un peu de mal à suivre. J'avoue qu'un coup de frais ne me déplaît pas. Montevideo, capitale et seule grande ville du pays, tranche de suite avec ce que j'ai vu à Asuncion. Clairement le Paraguay et l'Uruguay ne bénéficient pas du même développement économique. L'Uruguay, petit pays coincé entre le Brésil et l'Argentine, présente un niveau de vie assez confortable pour l'Amérique du Sud. Ma journée de visite sera très plaisante. Des places sympas le long de l'artère principale ou dans la vieille ville. Vers le port je vais tomber sur des anciennes halles en bois. Aujourd'hui, elles n'abritent plus de marché mais un enchaînement de restos aux jolies enfilades de petites tables en bois. Ambiance rustique et franchouillarde comme je les aime. En laissant tomber mon regard sur les fours à grillades je salive. Il ne serait pas 10h j'aurais déjà commandé une belle entrecôte avec un verre de malbec argentin. Au fil de mes déambulations j'observe un trait de la vie quotidienne uruguayenne assez singulier : le maté. Boisson à infusion qui détrône le café et le thé. Ce qui choque ou attire l’œil c'est la logistique que ça demande. Le maté se boit dans un récipient qui ressemble à un mug arrondi en bois assorti d'une sorte de paille métallique en forme de flûte. Qui dit infusion dit eau chaude et qui dit eau chaude dit thermos. Et du coup, dans la rue, on voit les gens se balader tranquillement avec tout cet attirail. Depuis Asuncion, j'en avais déjà vu, mais ici c'est vraiment quelque chose de courant. Je poursuivrais mon excursion vers le stade Centenario. Le stade qui a accueilli la première finale de la coupe du monde en 1930 (avec victoire de l'Uruguay). Aujourd'hui il fait plus que vétuste. Il abrite à présent sur une de ses ailes une école atypique, en faisant le tour je suis tombé sur la « cour », une partie du parvis privatisé par un cercle de barrières. Je finirais la journée en jetant un œil aux plages qui longent le Rio de la Plata et en remontant la rambla qui fait le tour de la ville.










A Colonia del Sacramento, je retrouverai des températures plus chaudes. Petit village colonial (espagnol et portugais) assez plaisant à visiter. Des rues pavées qui bordent des maisons tantôt colorées tantôt blanchies à la chaux. On fait rapidement le tour de l'ensemble : la place d'arme, la petite église, le ponton en bois, les plages caillouteuses... Deux jours étaient peut être un timing un peu optimiste. C'est pas grave j'en profiterai pour flâner et commencer à préciser la suite de mon parcours en commençant à regarder du coté du Chili et de la Nouvelle Zélande. Mais avant tout ça, ce sera Buenos Aires. Dés demain.





vidéo des chutes d'Iguazu:



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